L’homme moderne se nourrit actuellement de 35 Kg de sucre par an (pour les français). Le sucre, ou plutôt les sucres sont présents partout dans l’alimentation actuelle: gâteaux, confiseries, produits industriels… Ils n’ont plus forcément la saveur sucrée, mais ils sont utilisés comme exhausteur de goût ou comme conservateur au niveau industriel dans les produits ultra-transformés. Ces sucres ajoutés font l’objet de recommandations (notamment par l’OMS ou AHA) avec des seuils limites, souvent dépassés par la plupart des pays.
Malgré son caractère indispensable pour le fonctionnement de notre organisme, le sucre en excès peut entraîner de nombreux problèmes de santé. Alors qu’est ce que le sucre, quelles sont les complications d’une surconsommation de sucre, peut-on parler d’addiction au sucre et que se passe-t-il lorsque l’on arrête le sucre?
Table des matières
Qu’est-ce que le sucre?
Le sucre fait partie des glucides, que l’on retrouve dans beaucoup d’aliments. On distingue les glucides simples et les glucides complexes au niveau biochimique. en ce qui concerne les appellations du sucre dans notre alimentation, on distingue les sucres totaux, les sucres libres, les sucres naturellement présents et les sucres ajoutés.
D’un point de vue biochimique
Les glucides simples sont très facilement assimilables par l’organisme, car composés d’une ou de deux molécules de sucre; ils peuvent être naturels ou ajoutés. Parmi eux, on distingue:
- Glucose: présent dans les produits naturels au goût sucré, comme le miel ou les fruits
- Fructose: présent naturellement dans les fruits et légumes, ou dans les tubercules et racines de certaines plantes (comme l’artichaut ou l’oignon)
- Saccharose: composé d’une molécule de glucose et de fructose, c’est notre sucre de table
- Lactose: naturellement présent dans les produits laitiers
Les glucides complexes ou amidon sont composés de plusieurs molécules de sucres et doivent donc être coupés au cours de l’assimilation pour être absorbées. Elles sont donc assimilées beaucoup plus lentement et ont généralement un index glycémique plus faible. On les retrouve dans les pâtes et le riz par exemple.
D’un point de vue alimentaire
En ce qui concerne les appellations du sucre dans notre alimentation, on distingue:
- Les sucres naturellement présents: Ce sont les sucres naturellement présents dans la structure des aliments non transformés (ou peu), comme les fruits, légumes et le lait
- Les sucres ajoutés: ce sont les sucres ou sirops qui ont été ajoutés dans un deuxième temps aux boissons ou aliments lors de la préparation ou de la transformations de ces derniers. C’est par exemple le sucre de table, la cassonade, le miel, le sirop de maïs ou le sirop d’érable
- Les sucres libres: Ce sont les sucres ajoutés et les sucres naturellement présents dans les jus de fruits (est donc exclut le sucre présent naturellement dans le lait ou les fruits frais)
- Les sucres totaux: la somme des sucres ci-dessus
Il existe actuellement des recommandations quant à la quantité de sucres ajoutés autorisée ainsi que pour les sucres libres.
En 2015, l’OMS a recommandé la limitation d’apports en sucres libres, avec un maximum de 10% concernant l’apport quotidien en calories provenant des sucres libres.
Aux États-Unis, les recommandations sont de limiter à 10% l’apport quotidien en calories provenant de sucres ajoutés.
Le pouvoir addictif du sucre
Nous sommes exposés au sucre dès petit, et même déjà dans le ventre de notre mère. Le foetus découvre ses premières sensations gustatives en avalant ou inhalant le liquide amniotique. Une étude a démontré une déglutition accrue du foetus lors d’une injection dans le liquide amniotique d’un stimulus de goût sucré. Ces réactions face au sucre sont vérifiées même chez le nouveau-né avec une prédisposition nette à préférer le goût sucré par rapport aux autres goûts.
La fonction alimentaire répond à un besoin primaire, qui est associé au circuit de la récompense. Se nourrir répond à un besoin, dont l’assouvissement entraîne une récompense avec sensation de plaisir. Le circuit de la récompense au niveau cérébral met en jeu différentes zones du cerveau et différents neurotransmetteurs, dont entre autre la dopamine. Les zones en questions sont:
- L’aire tegmentale ventrale
- L’hypothalamus
- Le cortex préfrontal
- l’hippocampe et l’amygdale
- Le noyau accumbens
- Le striatum
Des expériences avec IRM fonctionnelle ont permis de mettre en évidence que ces zones sont activées en présence d’un stimulus sucré et calorique, sucré et non calorique ou de glucides non sucrés. Et une activation plus importante a été observée en présence du stimulus sucré et calorique.
On peut donc en conclure que ni le goût sucré ni l’aspect calorique sont nécessaires pour déclencher ce circuit de la récompense et que le cerveau fait la différence entre les différents stimulus: il préfère nettement le goût sucré et calorique.
Par ailleurs, parler d’addiction à une substance sous-entend également la présence d’un syndrome de dépendance avec un désir et d’un syndrome de sevrage à l’arrêt de cette substance. La triade « compulsion, tolérance manque au sevrage » est caractéristique d’une addiction.
Globalement, les études réalisées ont montré que les effets du sucre au niveau cérébral sont identiques à ceux des substances addictives, mais avec une intensité moins élevée. L’addiction au sucre pourrait donc entrer dans la catégorie des « désordres alimentaires liés à l’addiction ». En effet, ce n’est pas le sucre lui-même qui serait responsable de l’addiction, mais il y aurait une addiction liée à la libération d’opioïdes endogènes (endorphines) lors de la consommation de sucre. Donc, d’un point de vue théorique, on ne peut pas considérer réellement le sucre comme une substance addictive, même si les effets observables en pratique sont les mêmes.
Les conséquences de la surconsommation de sucre
Quelques soient les types d’apports en sucres, différents mécanismes et phénomènes, expliquent les conséquences décrites ci-dessous. Ils peuvent d’ailleurs être liés entre eux, les uns entraînant les autres… Parmi eux, nous pouvons citer:
- Une augmentation de la sensation de faim
- Un hyperinsulinisme: c’est-à-dire une augmentation de la sécrétion d’insuline pour diminuer le taux sanguin de sucre. A moyen et long terme, cette hypersécrétion d’insuline va favoriser un état d’insulinorésistance, où le corps par habituation, va devenir progressivement résistant à notre propre insuline et donc augmenter le taux de sucre dans notre corps.
- Hyperglycémie post-prandiale: c’est un taux de sucre trop important après le repas
- Appétence accrue envers les produits sucrés (goût adapté et calculé dans les produits industriels) et moindre appétence envers les fruits, légumes, micronutriments, fibres, tout produit naturel contenant antioxydant et composés phytochimiques, véritables alicaments
- Stress oxydatif
- Rétention et stockage des graisses
- Diminution des fonctions immunitaires
- Développement d’un syndrome métabolique: sur un terrain d’insulinorésistance, il associe une élévation des triglycérides, une baisse du bon cholestérol HDL, une inflammation chronique, une hypertension, un surpoids. C’est donc une association de troubles de la glycémie (sucre), des lipides (graisses) dans un contexte de surpoids et d’hypertension: le terrain idéal pour favoriser le développement des maladies cardiovasculaires (diabète, infarctus, artériopathie des membres inférieurs, accident vasculaire cérébral…)
Voici les principales complications médicales liées à la surconsommation de sucre:
Le surpoids et obésité
Le surpoids et l’obésité sont définis par l’OMS par une surcharge en graisse, qui peut nuire à la santé.
- Le surpoids se définit par un indice de masse corporel (IMC) entre 25 et 30. (L’IMC se calcule en divisant le poids par la taille en m au carré).
- L’obésité est définit par un IMC > 30
En 40 ans, le taux d’obésité mondial a triplé. Les problèmes liés au surpoids et à l’obésité ont dépassé les problèmes liés à la malnutrition et à l’insuffisance pondérale. Ce sont des problématiques liés au déséquilibre de la balance entre les apports et les dépenses énergétiques. Il y a trop d’apports par rapport aux dépenses, ce qui mène à un gain de poids corporel.
Le diabète
Le diabète est une maladie chronique de plus en plus fréquente dans nos pays occidentaux. Le nombre de personnes diabétique a quadruplé en 34 ans. C’est une maladie caractérisée par un taux de sucre dans le sang trop élevé, soit par défaut d’insuline soit en lien avec une résistance de notre organisme à l’insuline qui n’agit plus: c’est l’hyperglycémie chronique. Elle peut avoir des complications à long terme (vasculaires, rénales, ophtalmiques, neurologiques, cutanées…). Pour avoir plus d’informations sur le diabète, vous pouvez lire les articles suivants:
- Le diabète sucré, c’est quoi?
- Les aliments déconseillés pour le diabète
- Qu’est-ce-que le mal perforant plantaire chez les diabétiques
Les maladies cardiovasculaires
Les maladies cardiovasculaires sont un ensemble de pathologies en lien avec les facteurs de risques cardiovasculaires:
- L’hypercholestérolémie
- Le tabagisme
- La sédentarité
- Le diabète
- La surcharge pondérale et l’obésité
- L’hypertension artérielle
- L’âge et le sexe
Plus ces derniers s’accumulent, plus le risque cardiovasculaire augmente. C’est-à-dire que les probabilités de faire des maladies cardiovasculaires sont plus élevées, comme:
- Un infarctus du myocarde
- Un accident vasculaire cérébral
- Une artériopathie des membres inférieurs
- Une hypertension artérielle
Une surconsommation en sucre ajoutés favorise le développement de l’insulinorésistance, du surpoids, du stress oxydatif. Tout cela amenant progressivement à la stéatose hépatique, au syndrome métabolique, au diabète, à l’hypertension…. C’est donc un facteur de risque direct pour le développement de maladies cardiovasculaires.
Pour illustrer cela, une étude réalisée chez des infirmières a démontré une augmentation du risque d’accident coronarien de 35% chez les infirmières buvant 2 boissons sucrées par jour par rapport à celles qui n’en buvaient pas.
La stéatose hépatique
La stéatose hépatique non alccolique ou NASH est due à l’accumulation de triglycérides dans le foie, dans un contexte de surpoids et parfois de diabète et d’hypertension. C’est assez fréquent aujourd’hui, car cela touche environ 23% de la population générale, donc quasiment une personne sur quatre. Souvent sans symptômes, elle peut tout de même arriver au long cours au stade d’inflammation chronique au niveau du foie, favorisant le développement d’une cirrhose et parfois d’un cancer.
Cet état est directement associé à la surconsommation de sucres (notamment de glucides simples, de boissons sucrées non nutritives et sans alcool). De plus, c’est une combinaison de plusieurs facteurs de risque pour développer des maladies cardiovasculaires, comme l’infarctus ou l’accident vasculaire cérébral.
Les cancers
Différents mécanismes expliquent le rôle de la surconsommation de sucres dans le développement de cancers ou dans l’entretien de ces derniers. En effet, les cellules cancéreuses raffolent de sucre…
Des études ont permis de démontrer, entre autre, les associations suivantes:
- Lien entre obésité et cancer
- Augmentation du risque de cancer du sein avec notre alimentation occidentale
- Développement des tumeurs et des métastases plus rapide avec un régime sucré
- Une augmentation de 10% de la proportion d’aliments ultra-transformés dans le régime alimentaire s’est révélée être associée à une augmentation de plus de 10% des risques de développer un cancer en général, et plus particulièrement un cancer du sein
- Terrain prédisposant de la stéatose hépatique dans le développement du cancer du foie
Les maladies bucco-dentaires
Plus fréquentes que ce que l’on imagine, le développement des caries nécessitent non seulement la présence de sucre, mais aussi la présence de bactéries cariogènes, associées à un terrain particulier de la personne. Le rôle du sucre n’est plus à démontrer dans le développement des caries.
Au-delà des caries, les boissons sucrées favorisent également l’érosion dentaire, via leur apports d’acides.
Que se passe-t-il à l’arrêt du sucre? Les bénéfices…
Lorsque vous arrêter le sucre pendant plusieurs jours, voici ce à quoi vous attendre:
- Perte de l’appétit pour les aliments sucrés: vous n’aurez plus envie de sucre! Cela se produit au bout de quelques jours, cette perte d’appétence n’est pas immédiate, mais réelle au bout d’un certain temps. En effet, lorsque vous ingérez du sucre, il se passe à court terme après le pic d’hyperglycémie, une hypoglycémie. Ce taux bas dans le sucre crée de nouveau le besoin et l’envie de sucre
- Perte de la sensation de faim: le sucre maintient cette envie de manger…
- Diminution de l’insulinorésistance: votre corps va retrouver sa « sensibilité normale » progressivement, il va retrouver son équilibre. Cela va permettre de rétablir une absorption normale de tous les micronutriments, des vitamines…
- Diminution de la sensation de fatigue: particulièrement la fatigue post-prandiale, c’est-à-dire après les repas
- Diminution de notre rétention hydrique et de la graisse stockée
- Amélioration au niveau de l’humeur et diminution du stress
- Amélioration au niveau des fonctions cognitives: plus de concentration et d’attention
- Meilleure mine avec une peau en meilleure santé: diminution de l’acnée à moyen terme et meilleur éclat de votre peau. Lorsque nous mangeons du sucre, l’insuline augmente, ce qui a tendance à faire augmenter les androgènes (hormones mâles chez la femme). Cette augmentation joue un rôle dans l’acnée.
- Diminution de l’inflammation, notamment au niveau articulaire, avec baisse des douleurs et de la raideur
Les premiers jours d’arrêt du sucre, vous aller possiblement avoir quelques symptômes, qui sont liés à cette « addiction » que nous avons: par exemple, une fatigue intense, des nausées, des maux de tête, des vertiges…. C’est l’équivalent d’un « syndrome de sevrage » à petite échelle, mais bien réel. Ces symptômes disparaissent progressivement au bout de quelques jours.
Votre corps n’ayant plus de sucre pour délivrer de l’énergie à vos cellules, il va progressivement aller puiser dans ses réserves de graisse pour apporter l’énergie nécessaire. La nature du carburant change et donc des modifications vont avoir lieu. Parmi elles:
- La fabrication de nouvelles enzymes par vos cellules: en effet, elles vont devoir métabolisées une source différente de carburant, donc les outils devront être différents
- Une diminution de l’inflammation dans vos artères
- Croissance de vos neurones: en cas de carence en glucose, votre cerveau va puiser l’énergie à travers les corps cétoniques. Ces derniers favorisent la croissance des cellules nerveuses
- Libération de la surcharge de graisse au niveau du foie: cette carence en glucose permet littéralement un nettoyage hépatique
- Amélioration de la fonction rénale
Au delà de toutes ces modifications et de ces bénéfices, vous aurez également moins de probabilités de développer toutes les pathologies décrites ci-dessus en lien avec la surconsommation de sucre. Il est donc assez clair que diminuer de manière drastique votre consommation de sucre diminue votre risque cardiovasculaire, votre risque de développer un cancer et donc d’être en meilleure santé.
Conclusion
Il est donc vital pour notre santé de réduire au maximum le sucre de notre alimentation, et de ne pas habituer nos enfants à cela… Limiter les sucres ajoutés est un challenge dans notre société, surtout face à des grandes firmes au marketing implacable. Tous les aliments contenant des sucres ajoutés sont souvent en vente de manière omniprésente, à prix bas et souvent dans une large gamme. Difficile d’y résister, surtout lorsque l’on sait que le sucre appelle le sucre… Ceci étant, après avoir lu cet article, la motivation d’arrêter tous ces sucres ajoutés va probablement vous prendre… Bon courage!
Bibliographie
https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-02290132/document
https://www.anses.fr/fr/content/sucres-dans-l%E2%80%99alimentation
https://www.inspq.qc.ca/sites/default/files/publications/2236_consommation_sucre_sante_0.pdf