Y a-t-il différents types d’ostéopathie?

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L’ostéopathie est maintenant très répandue en France. Elle fait partie des médecines complémentaires et alternatives (MCA) et nous avons pu observer un nombre grandissant de nouveaux ostéopathes ces 20 dernières années. En 2016, on comptait environ 2500 habitants pour un ostéopathe. La demande du côté des patients est très importante pour soulager différents troubles et la consultation ostéopathique se place parfois avant la consultation médicale. Il est évident que le nombre de consultations pour des motifs ostéo-articulaires en médecine générale est important.

Alors qu’en est-il de l’ostéopathie actuellement en France, quels sont les différents types d’ostéopathie, pourquoi et quand consulter un ostéopathe, à qui s’adresse cette pratique…? Découvrons tout cela.

L’ostéopathie, c’est quoi?

Description

Le nom d’ostéopathie est un néologisme inventé par Andrew Taylor Still. Ses racines éthymologiques grecques  (« osteon » = os et « pathos » = souffrance) renvoient à la « souffrance par les os ». L’ostéopathie est une pratique manuelle qui a pour but de diagnostiquer (diagnostic ostéopathique et non diagnostic médical) et traiter des anomalies fonctionnelles et structurelles de l’appareil locomoteur. Au sens large, l’ostéopathe recherche des « dysfonctions » mécaniques et ou réflexes au niveau articulaire ainsi que les douleurs projetées qui peuvent en résulter. Il va utiliser différentes techniques qui vont agir sur la structure tout en tenant compte de la fonction des éléments mis en jeu dans la dysfonction, afin de rétablir le juste équilibre fonctionnel.

Les principes de l’ostéopathie

L’ostéopathie est sous-tendue par les grands principes suivants:

  1. La structure et la fonction de l’entité atteinte sont interdépendantes: la structure conditionne sa fonction et toute atteinte de la structure entraînera une dysfonction. Une structure anatomique (articulaire, musculaire…) normale permet à toutes les fonctions d’être parfaitement opérationnelles, ce qui permettra un mouvement normal, indolore avec ses amplitudes normales. A contrario, si la structure est atteinte, la fonction sera diminuée avec présence de douleurs et atteinte du mouvement.
  2. Le corps est une Unité: le corps humain est une entité anatomique complète alliant os, muscles, tendons, nerfs, organes…. tous reliés et interconnectés les uns aux autres. Il est donc difficile d’imaginer une atteinte locale sans conséquences sur le tout. C’est pour cela qu’il est possible d’avoir des atteintes que l’on appelle projetées, c’est-à-dire à un endroit différent et éloigné de la dysfonction structurelle.
  3. L’individu pris dans sa globalité: l’ostéopathe va prendre en considération non seulement l’atteinte physique qu’il a palpé et objectivé, mais aussi l’environnement du patient: historique, social, professionnel, personnel, émotionnel, mental….
  4. Les capacités d’autoguérison du corps: La Nature est beaucoup plus intelligente et plus forte que nous. Notre corps est doté de possibilités d’autorégulation, d’autodéfense et d’autoguérison. L’ostéopathe va tenir compte de cela et va stimuler et relancer ces capacités.

Cadre réglementaire actuel en France

Suite à l’article 75 de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002, le titre d’ostéopathe est officiellement reconnu en France.

Les décrets du 25 mars 2007 encadrent la profession d’ostéopathe en terme de formation et de conditions d’exercice. Le titre d’ostéopathe est réservé aux titulaires d’un diplôme reconnu ou aux médecins, sages-femmes, kinésithérapeutes et infirmiers ayant un diplôme universitaire. Ces praticiens ont le droit de réaliser des manipulations, manuelles et externes, musculo-squelettiques pour éviter ou soulager des troubles fonctionnels du corps humain.

L’ostéopathe doit orienter vers un médecin:

  • En cas de symptômes nécessitant des examens complémentaires, un diagnostic ou un traitement
  • Devant la persistance ou l’aggravation des symptômes
  • Si la symptomatologie dépasse ses compétences

Il doit avoir un diagnostic précis avec la certitude de l’absence de contre-indications en cas de:

  • Manipulations du rachis cervical
  • Manipulations du crâne, de la face et du rachis chez le nourrisson de moins de 6 mois

Par ailleurs, il est interdit pour un ostéopathe:

  • De faire des manipulations gynéco-obstétricales
  • De réaliser des touchers pelviens (toucher vaginal ou toucher rectal)

Les différents types d’ostéopathie

Il existe en pratique différents types d’ostéopathie: tissulaire, mécanique, crânienne, biodynamique, énergétique, structurelle, viscérale…. Ce sont des pratiques ostéopathiques qui répondent à différents modèles décrits ci-dessous.

Selon l’OMS, cinq modèles principaux de relations structure-fonction guident l’approche du praticien ostéopathe en matière de diagnostic et de traitement. Ces modèles peuvent être bien sûr associés pour obtenir le maximum d’informations cliniques afin d’avoir une évaluation globale diagnostique et thérapeutique.

Le modèle biomécanique structure-fonction

Le modèle biomécanique considère le corps humain comme un ensemble de composantes organiques toutes reliées et articulées ensemble pour obtenir un équilibre et une posture. Ces derniers dépendent directement des forces exercées entre ces différentes composantes, qui régulent donc notre équilibre postural et qui peuvent être responsables parfois de douleurs en fonction des contraintes exercées. Cela affecte essentiellement les fonctions dynamiques des structures (muscles, articulations, os, tendons, fascias…) et donc la mobilité.

Les techniques de manipulations ostéopathiques permettent de répondre aux déséquilibres de ce modèle musculosqueletique. L’ostéopathie « biodynamique », « structurelle » ou « mécanique », rentrent dans ce cadre là.

 

Le modèle structure-fonction respiratoire/circulatoire

Le modèle respiratoire/circulatoire vise le maintien des milieux intra et extracellulaires afin de veiller à l’apport optimal d’oxygène et de nutriments nécessaires au bon fonctionnement des structures. La circulation doit être fluide afin d’assurer non seulement les apports mais aussi d’éliminer correctement les déchets. On peut comprendre qu’une dysfonction mécanique peut avoir un retentissement avec blocage variable de la circulation. Donc toute levée de dysfonction permettra un rétablissement circulatoire.

Le modèle structure-fonction neurologique

Le modèle neurologique prend en compte bien évidemment les structures nerveuses qui sous-tendent les structures somatiques, non seulement au niveau de la proprioception mais aussi au niveau de la douleur. Ces structures neurologiques expliquent également les douleurs projetées, qui sont des manifestations à connaître afin de pouvoir traiter correctement la cause, qui se trouve à un endroit différent de la douleur.

Le modèle structure-fonction biopsychosocial

Le modèle biopsychosocial reconnaît les diverses réactions psychologiques et émotionnelles qui peuvent affecter la santé des patients. Cela englobe les facteurs environnementaux, socio-économiques, culturels, physiologiques, psychologiques et professionnels qui influencent la maladie.

Le modèle structure-fonction bioénergétique

Le modèle bioénergétique reconnaît que le corps cherche à maintenir un équilibre entre la production, la distribution et la dépense d’énergie. Le maintien de cet équilibre est garant d’une adaptation optimale de l’organisme face à divers facteurs de stress (immunologiques, nutritionnels, psychologiques…)

Les mécanismes d’action

Les manipulations structurelles

Ce sont des manipulations au niveau articulaire, de faible amplitude mais à « haute vélocité ». Elles permettent une dépression intra-articulaire du liquide synovial entraînant un mouvement gazeux, responsable du bruit de craquement. Le craquement n’est pas indispensable pour une bonne efficacité de la manipulation.

Ce type de manipulation est actif sur:

  • Les articulations vertébrales: avec un phénomène de cavitation qui est responsable du bruit typique
  • Le disque intervertébral: en lien avec une variation de pression
  • Les muscles paravertébraux: en lien avec les mécanismes d’inhibition et les réflexes myotatiques
  • Elles pourraient peut-être avoir une action sur la circulation sanguine locale, mais aucune étude n’a prouvé cela
  • Sur la douleur: le système de contrôle inhibiteur nociceptif diffus serait activé. Il trouve son origine dans la substance grise périacqueducale, au niveau central, c’est-à-dire cérébral. Il permet de soulager une douleur par une stimulation douloureuse dans un territoire différent.

Les techniques myotensives

Elles visent les muscles et sont basées sur des mouvements alternant un étirement du muscle et une contraction contre résistance. Elles permettent une détente du muscle en question.

Les techniques de Jones

L’appui prolongé d’un point (au niveau d’un muscle ou ligaments ou insertion tendineuses) pendant 90 secondes permet une décontraction du muscle et une diminution de la douleur. Les mécanismes ne sont pas encore bien connus mais reposeraient sur les voies neurologiques de la douleur au niveau des afférences alpha 1a et des efférences gamma.

Le traitement général ostéopathique (TGO)

Souvent fait en début de séance, il permet de mobiliser les articulations dans toutes leurs amplitudes. Les mouvements peuvent être rotatifs ou en va-et-vient, afin d’augmenter les capacités de mouvements.

Les techniques viscérales

Elles permettraient de rétablir le fonctionnement physiologique des organes, qui seraient atteints d’une « dysfonction ». Cette dernière est en lien avec des tensions locales (myofaciales, ligamentaires), des anomalies du système nerveux autonome ou des anomalies que l’on appelle somatoviscérales (atteinte somatique ayant une conséquence sur le fonctionnement d’un organe).

Les techniques viscérales sont des techniques de palpation, vibration, compression ou encore traction sur les muscles, les fascias ou encore les ligaments afin de retrouver la motilité viscérale.

Les manipulations crâniennes

L’ostéopathie crânienne est basée sur le « mécanisme respiratoire primaire », propre à chacun et indépendant des rythmées respiratoire et cardiaque. Il repose sur:

  • La motilité propre du cerveau et de la moelle épinière
  • La fluctuation du LCR (Liquide Céphalo Rachidien)
  • La mobilisation possible fine des membranes intra-crâniennes et dans la moelle
  • La mobilité des os du crâne

L’ostéopathe va agir sur les diminutions de mobilité au niveau de ces structures avec ses doigts.

Les principales indications de ce type de manipulations sont: maux de tête, cervicalgies, dysfonctions au niveau des articulations temporo-mandibulaires, vertiges et acouphènes.

À ce jour, l’ostéopathie crânienne n’a pas prouvé scientifiquement son efficacité.

 

Pourquoi et quand voir un ostéopathe?

Les raisons d’une consultation ostéopathique

Vous pouvez consulter un ostéopathe:

  • En premier recours ou après un avis médical: il est toujours possible de voir un ostéopathe en premier recours pour un problème bénin. En cas de doute, l’ostéopathe peut vous demander de voir votre médecin traitant avant de réaliser des manipulations, qui pourraient être délétères dans certains cas.
  • Dans un cadre préventif ou curatif: le recours aux différentes techniques ostéopathiques va permettre de vous soulager d’un certain nombre de symptômes, notamment les douleurs et les contractures musculaires. Ostéopathie ne rime pas avec « craquage des articulations…. » Il existe de nombreuses autres techniques douces permettant une action curative. L’ostéopathie peut également permettre d’éviter les récidives de certaines douleurs et éviter l’apparition de nouveaux symptômes en réalisant un examen ostéopathique systématique pour régler les petites dysfonctions non encore symptomatiques.
  • Pour un problème aigu ou chronique: Il est possible de consulter un ostéopathe pour un problème aigu, comme un torticolis par exemple, ou pour des lombalgies chroniques

Par ailleurs, il est aussi possible de consulter un médecin qui a fait une formation d’osteopathie ou un DIU (Diplôme Inter Universitaire) de Médecine Manuelle Ostéopathique.

Quels sont les indications de l’ostéopathie?

Le décret du 25 mars 2007 fixe les limites du champ d’action des ostéopathes: « L’ostéopathie a pour seul but de prévenir ou remédier à des troubles fonctionnels du corps humain, à l’exclusion des pathologies organiques, qui nécessitent une intervention thérapeutique, médicale, chirurgicale, médicamenteuse ou par des agents physiques.. » C’est une définition très large, qui laisse un flou notable sur ce que l’on appelle « troubles fonctionnels ».

Ceci étant, selon le SMMOF (Syndicat de Médecine Manuelle Ostéopathie de France), la SOFMMOO (Société Française de Médecine Manuelle Orthopédique et Ostéopathique) et Ostéofrance, voici les principales indications et pathologies qui peuvent être prises en charge en ostéopathie:

 

Quelles sont les contre-indications de l’ostéopathie?

En fonction de la pathologie:

Poser une contre-indication est une évaluation au cas par cas après expertise par le professionnel. Voici les principales contre-indications:

  • Les pathologies tumorales: les cancers avec des métastases osseuses sont de contre-indications à la manipulation…
  • Les pathologies inflammatoires chroniques: la spondylarthrite ankylosante, la polyarthrite rhumatoïde…
  • Les pathologies infectieuses: une spondylodiscite (infection d’une vertèbre)..
  • Les pathologies traumatiques: fracture, présence de matériel comme les prothèses…
  • La présence d’un déficit sensitif et/ou moteur pour les pathologies neurologiques: hernie discale avec sciatique, névralgie cervicobrachiale
  • Les pathologies vasculaires: antécédent d’accident vasculaire cérébral, troubles de la coagulation..
  • Des maladies congénitales graves
  • Une vigilance pour les pathologies psychiatriques non équilibrées sous traitement

Selon le thérapeute:

Pour les ostéopathes non médecins et non sages-femmes: il est interdit de réaliser des touchers pelviens et des manipulations obstétricales.

Pour les ostéopathes non médecins, il est interdit de pratiquer des manipulations du rachis cervical ou des manipulations du crâne, de la face et du rachis chez le nourrisson de moins de 6 mois, sauf en présence d’un certificat de non contre-indication signée par un médecin.

L’ostéopathie, pour qui?

Elle peut être destinée à tout le monde, nourrissons, enfant et adulte, hors contre-indications bien sûr.

Différence Ostéopathie/Chiropraxie

La chiropraxie a un champ limité au niveau des structures articulaires, et se concentre plus particulièrement au niveau de la colonne vertébrale et du bassin. L’ostéopathie vise la globalité du corps humain et se concentre sur les articulations, mais aussi sur les muscles pour l’ostéopathie structurelle et mécanique, tissulaire et viscérale, afin d’avoir une action de soulagement. Les ostéopathes recherchent des atteintes à distance de la lésion articulaire: par exemple des atteintes myofasciale ou viscérale.

Conclusion

Il est aujourd’hui courant de consulter un ostéopathe, surtout pour des problèmes musculosqueletiques. Cela peut vous apporter un réel soulagement selon la problématique. Il est cependant important de rester toujours vigilant quand aux contre-indications pour éviter toute manipulation délétère avec des effets indésirables très rares mais très embêtants… L’ostéopathie n’est pas prise en charge par la CPAM, mais des mutuelles aujourd’hui remboursent un certain nombre de séances par an. L’ostéopathie est un outil thérapeutique qui peut indéniablement faire partie de la prise en charge globale d’un patient pour certaines problématiques. La jeune génération de médecins qui a grandi avec le développement de cette pratique est peut-être plus sensible à cette dernière….

 

Bibliographie

http://thesesante.ups-tlse.fr/1722/1/2017TOU31019-1020.pdf

https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01584087/document

https://hal.univ-lorraine.fr/hal-01733397/document

http://memoires.scd.univ-tours.fr/Medecine/Theses/2020_Medecine_PellerinClement.pdf